L'accord pour l'emploi dans les grandes lignes
Le nouvel accord pour l’emploi prévoit des mesures visant à accroître le taux d’emploi et à permettre un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Le processus législatif peut désormais débuter. Il faudra certes attendre encore un peu avant que toutes les mesures entrent en vigueur, mais vous en trouverez d’ores et déjà ci-dessous les grandes lignes.
Publication anticipée des horaires de travail à temps partiel variables
Actuellement, les horaires de travail à temps partiel variables doivent être communiqués au moins 5 jours ouvrables à l’avance. Une CCT peut réduire ce délai à 1 jour ouvrable au minimum.
À l’avenir, ces horaires devront être communiqués au moins 7 jours ouvrables à l'avance. Il sera encore possible d’y déroger au moyen d’une CCT, mais un délai minimum de 3 jours ouvrables devra alors être respecté.
Les CCT qui prévoient déjà une dérogation sont maintenues, mais peuvent être remplacées par une nouvelle CCT.
Les dispositions du règlement de travail qui déterminent le délai et le mode de communication des horaires de travail aux travailleurs à temps partiel devront être adaptées aux nouvelles règles. Les employeurs auront 2 ans pour le faire après l’entrée en vigueur des adaptations.
Semaine de 4 jours ou changement de régime hebdomadaire : possibilité de demande d’adaptation du temps de travail par le travailleur
Semaine de 4 jours
À l’avenir, un travailleur à temps plein pourra demander à répartir ses prestations sur 4 jours. La loi sera adaptée de sorte que les travailleurs puissent prester jusqu’à 9,5 heures par jour, le cas échéant. Une CCT pourra même porter cette limite à 10 heures.
L’employeur pourra refuser la demande, mais devra motiver son choix par écrit dans le mois.
Si l’employeur est d’accord, une convention écrite devra être conclue au plus tard au moment où le travailleur commence à travailler dans ce nouveau régime. Cette convention aura une durée d’au maximum 6 mois et devra contenir les mentions obligatoires suivantes :
- Début et fin de fin de la journée de travail ;
- Moment et durée des intervalles de repos ;
- Jours d'interruption régulière du travail ;
- Dates de début et de fin de la période sur laquelle porte la convention.
Une copie de cette convention devra être transmise au comité pour la prévention et la protection au travail. Tant la demande du travailleur que la convention entre l’employeur et le travailleur devront être conservées à l’endroit où le règlement de travail peut être consulté, et ce, pendant toute la période à laquelle elles se rapporteront. L’employeur devra ensuite les conserver 5 ans après la fin de la semaine de 4 jours.
La demande du travailleur ne pourra pas avoir pour conséquence qu'il soit pénalisé. Il bénéficiera en outre d’une protection contre le licenciement, sauf pour des motifs étrangers à sa demande.
Changement de régime de travail
Introduction
Un travailleur à temps plein pourra aussi demander un changement de régime hebdomadaire. Dans ce cas aussi, une convention pour une durée d’au maximum 6 mois devra être établie par écrit au préalable et l’employeur devra motiver son refus éventuel par écrit dans le mois.
Cette convention devra mentionner les dates de début et de fin de la période d’application, ainsi que l’heure de début du cycle, afin que l’on puisse toujours vérifier quand débute chaque cycle.
Une copie de cette convention devra également être transmise au comité pour la prévention et la protection au travail. Et ici aussi, tant la demande du travailleur que la convention entre l’employeur et le travailleur devront être conservées à l’endroit où le règlement de travail peut être consulté, et ce, pendant toute la période à laquelle elles se rapporteront. L’employeur devra ensuite les conserver 5 ans après la fin du changement de régime hebdomadaire.
La demande du travailleur ne pourra pas non plus avoir pour conséquence qu'il soit pénalisé et il bénéficiera aussi d’une protection contre le licenciement, sauf pour des motifs étrangers à sa demande.
Pour que tout soit bien clair
Il faut entendre par « semaine » une période de 7 jours consécutifs qui ne s’étend pas forcément du lundi au dimanche.
Par « changement de régime hebdomadaire », il faut entendre un régime de travail organisé selon un cycle qui s'étend sur une période de deux semaines consécutives pendant laquelle les prestations de la première semaine sont compensées par les prestations de la seconde semaine, afin de respecter en moyenne la durée hebdomadaire normale de travail.
Par dérogation à ce qui précède, il est également possible de convenir que, pendant le 3e trimestre (vacances d’été), un cycle s’étale sur une période de quatre semaines consécutives pendant laquelle les prestations des deux premières semaines sont compensées par celles des deux dernières semaines, afin de respecter en moyenne la durée hebdomadaire normale de travail.
Attention : le terme « cycle » est défini comme une succession d'horaires journaliers de travail dans un ordre FIXE. Les prestations doivent s’inscrire dans le cadre qui est fixé dans le règlement de travail pour le changement de régime hebdomadaire.
Le règlement de travail doit contenir les dispositions suivantes :
- Durée moyenne de travail hebdomadaire qui doit être respectée au cours du cycle ;
- Jours de la semaine pendant lesquels des prestations de travail peuvent être fixées ;
- Plage journalière dans laquelle des prestations de travail peuvent être fixées ;
- Durée de travail journalière minimale et maximale, sans que la durée de travail journalière ne puisse dépasser 9 heures ;
- Durée de travail hebdomadaire minimale et maximale, sans que la durée de travail hebdomadaire ne puisse dépasser 45 heures.
Dérogation à la dérogation
En cas d’événement imprévu pour le travailleur, il pourra être convenu que le cycle s’étende exceptionnellement sur une période de 4 semaines consécutives. Le travailleur devra pour ce faire introduire une demande écrite motivée faisant mention de l’événement imprévu. Une annexe devra dans ce cas être jointe à la convention. Cette annexe devra être conservée à l’endroit où est conservé le règlement de travail pendant la période à laquelle elle aura trait. L’employeur devra ensuite la conserver 1 an après la fin de la dérogation.
Rupture anticipée
Le travailleur a le droit de mettre fin anticipativement au changement de régime hebdomadaire pour repasser à son régime de travail initial. Il doit en informer l’employeur au moins 2 semaines avant le début d’un nouveau cycle.
Économie de plateforme
Lutte contre les faux indépendants
Comme d’autres secteurs spécifiques, l’économie de plateforme est grevée par les faux indépendants.
Une liste de 8 critères spécifiques sera donc établie. La relation de travail sera alors présumée s’inscrire dans le cadre d’un contrat de travail si au moins 3 de ces 8 critères sont remplis, sauf si le contraire peut être prouvé.
Plus d’informations suivront.
Accidents de travail : aussi pour les travailleurs de plateformes
Les travailleurs occupés dans l’économie de plateforme (Uber, Deliveroo, etc.) relèvent désormais littéralement du champ d’application de la loi sur les accidents de travail. Il en résulte donc que leurs employeurs devront conclure une assurance accidents de travail les concernant et qu’un revenu de remplacement sera d’application en cas d’accident de travail, chose qui n’était pas toujours claire jusqu’ici.
Trajets de transition
Dans une tentative d'inciter les travailleurs licenciés à chercher plus activement un nouvel emploi, un nouveau concept a vu le jour : le trajet de transition. Celui-ci signifie que le travailleur peut, pendant son délai de préavis, être mis à la disposition d’un autre employeur-utilisateur par le biais d’une agence d'intérim ou d'un service régional d’aide à l’emploi. Il s’agit d'une nouvelle exception à l’interdiction de mise à disposition de travailleurs.
Tant l’employeur que le travailleur peuvent proposer ou demander ce type de trajet.
Avant le début du trajet, les conditions et la durée du trajet sont fixées par écrit entre les différentes parties, à savoir l’employeur, le travailleur, l’employeur-utilisateur et l’agence d’intérim ou le service régional d’aide à l’emploi.
Pendant la période de mise à disposition, l’employeur paie au travailleur le salaire d’application chez l’employeur-utilisateur pour la fonction qu’il y exerce, ou le salaire en cours pour la fonction chez l’employeur même, si celui-ci est supérieur à la rémunération chez l’employeur-utilisateur. L’employeur-utilisateur devra compenser une partie de ce salaire par un paiement à l’employeur.
Si les parties le souhaitent, il sera possible de mettre fin anticipativement à ce trajet en respectant un délai de préavis. Le travailleur et l’employeur-utilisateur en avertiront l’employeur par écrit.
Après la fin du trajet, l’employeur-utilisateur engagera le travailleur dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée. S’il ne le fait pas, il devra payer au travailleur une indemnité égale au salaire en cours pour une durée correspondant à la moitié du trajet.
L’ancienneté du travailleur commence à courir à partir du début du trajet. Le travailleur conservera en outre l’ancienneté acquise en vertu de son contrat de travail précédent s'il souhaite réduire ou interrompre ses prestations dans le cadre d'une interruption de carrière, d'un crédit-temps ou d'un congé thématique.
Promotion de l’employabilité
Puisque les secteurs ne parviennent pas à élaborer des mesures de promotion de l’employabilité, la législation sera adaptée à cet effet. L’initiative ne sera plus laissée aux secteurs, mais sera ancrée dans la loi.
Lorsqu’un travailleur est licencié par son employeur et a droit à un délai de préavis d’au moins 30 semaines, ce délai de préavis sera (comme auparavant) scindé en 2 parties :
La partie 1 se compose d'un délai de préavis correspondant à au moins 2/3 du délai de préavis total, pour une durée minimum de 26 semaines. Elle pourra aussi prendre la forme d'une indemnité de préavis correspondant à la durée de ce délai de préavis ou du reste de ce délai de préavis (s'il a été converti en rupture immédiate).
La partie 2 se compose aussi d’un délai de préavis, à savoir le reste du délai de préavis total, diminué de la première partie. Il peut ici aussi s’agir d'une indemnité de préavis.
Durant cette deuxième partie, le travailleur a soit le droit de quitter son travail avec maintien de sa rémunération pour suivre des mesures de promotion de l’employabilité (en cas de délai de préavis), soit, si une indemnité de préavis a été payée, l’obligation de rester disponible pour suivre des mesures de promotion de l’employabilité.
La valeur de ces mesures doit être égale au montant des cotisations patronales sur cette partie du délai de préavis ou de l’indemnité de préavis.
L’obligation de rester disponible expire lorsque la personne concernée entame une nouvelle relation de travail ou exerce une activité indépendante.
E-commerce
Le cadre spécial du travail le dimanche et de nuit dans l’e-commerce, qui a expiré le 31 décembre 2019, devrait être réintroduit et évalué après 2 ans par le Conseil national du travail.
Des expériences seront menées pour permettre aux travailleurs de passer volontairement à un régime de nuit pour l’exécution de tous les services logistiques et auxiliaires liés au commerce électronique.
Les travailleurs qui veulent participer à cette expérience doivent le communiquer par écrit à l’employeur. Les travailleurs qui ne souhaitent PAS y participer bénéficieront d’une protection contre le licenciement. Ils ne pourront pas être licenciés, sauf pour un motif étranger au refus de participer. L’employeur devra pouvoir le prouver.
Les employeurs qui souhaitent participer à ce type d’expérience devront le communiquer par écrit à la direction locale compétente du Contrôle des lois sociales du SPF ETCS d’une part, et à la (sous-)commission paritaire d’autre part.
Les organes de concertation de l’entreprise seront impliqués dans la mise en œuvre de l’expérience.
Il s’agit d'une expérience unique pour une durée maximale de 18 mois.
Attention : il n’est PAS question d’un régime de travail avec des prestations de nuit (= prestations entre 24h et 5h du matin). Il s’agit de prestations jusqu’à 24h et à partir de 5h.
Droit à la déconnexion
Alors que l'employeur pouvait jusqu'ici se contenter d'organiser une concertation au sein du comité pour la prévention et la protection au travail en ce qui concerne la déconnexion et l’utilisation des moyens de communication numériques, il deviendra obligatoire de définir les modalités y afférentes dans une CCT d’entreprise ou le règlement de travail. Les employeurs de moins de 20 travailleurs ne sont pas visés.
La CCT d’entreprise devra être déposée au greffe du SPF ECTS. En cas de recours au règlement de travail, une copie devra également être transmise au Contrôle des lois sociales. Cette obligation ne s'applique pas si une réglementation est prévue par le Conseil national du travail ou au moyen d'une CCT sectorielle d'ici le 1er janvier 2023.
Formations
Plans de formation
La réglementation relative aux plans de formation (qui trouve son origine dans la loi sur le travail faisable et maniable) sera à nouveau modifiée et remplacée par un régime similaire.
Chaque année avant le 1er mars, les employeurs occupant au moins 20 travailleurs devront élaborer un plan de formation pour leurs travailleurs.
Un projet devra être présenté au conseil d’entreprise ou, à défaut, à la délégation syndicale. En l'absence de délégation syndicale, le plan devra être soumis aux travailleurs.
Une copie du plan devra être transmise au Contrôle des lois sociales.
Droit à la formation
Tout travailleur d’un employeur occupant au moins 10 travailleurs disposera, à partir du 1er janvier 2024, d'un droit individuel à la formation d’au moins 5 jours par an par équivalent temps plein. Cette mesure devra être concrétisée via une CCT sectorielle ou via le compte formation individuel.
CCT sectorielle
La CCT doit prévoir les éléments suivants :
- Droit individuel à la formation :
-
- d’au moins 3 jours de formation par an par ETP en 2022 ;
- d’au moins 4 jours de formation par an par ETP en 2023 ;
- d’au moins 5 jours de formation par an par ETP en 2024 ;
-
- Trajectoire de croissance déterminant dans quelle mesure le nombre de jours de formation sera augmenté pour parvenir à un droit individuel à la formation d’au minimum 5 jours par an par ETP à partir du 1er janvier 2024. Pour définir cette trajectoire de croissance, il sera tenu compte du nombre de jours de formation existant au 1er janvier 2022 ;
- Cadre pour l’exécution pratique du droit individuel à la formation et pour la réalisation de la trajectoire de croissance.
La CCT doit être déposée au plus tard au 30 septembre de la première année de la période de 2 ans (débutant pour la première fois le 1er janvier 2021), sauf si une autre date est prévue par A.R. Pour l’année 2022, une échéance dérogatoire est prévue, à savoir le 30 juin 2022.
Compte formation individuel
Si l’entreprise n’a pas recours à une CCT, un compte formation individuel doit être mis en place et concrétisé au moyen d'un formulaire reprenant plusieurs mentions obligatoires.
L’employeur doit informer les travailleurs de l’introduction du compte formation individuel. Le travailleur doit à tout moment pouvoir consulter son compte formation individuel.
Si l’entreprise ne respecte pas les obligations susmentionnées, elle devra appliquer un droit individuel à la formation d’au moins 3 jours par ETP à partir du 1er janvier 2022, d’au moins 4 jours par an par ETP à partir du 1er janvier 2023 et d’au moins 5 jours par an par ETP à partir du 1er janvier 2024.
Solde des jours de formation
En fin d’année, le solde des jours de formation inutilisés sera transféré à l’année suivante, sans pouvoir être déduit du crédit de formation du travailleur pour cette année suivante.
À la fin de chaque période de 5 ans (pouvant commencer au plus tôt au 1er janvier 2024) ou avant la fin du contrat de travail si celui-ci prend fin avant l’expiration de cette période de 5 ans, le travailleur doit avoir suivi en moyenne au moins 5 jours de formation par an par équivalent temps plein.
Licenciement
En cas de licenciement n’émanant pas du travailleur, celui-ci a le droit de prendre ses jours de formation non épuisés accumulés par période de 5 ans avant la fin de son contrat de travail.
Régime dérogatoire pour les employeurs occupant au moins 10 mais moins de 20 travailleurs
Par dérogation à ce qui précède, les employeurs qui occupent au moins 10 travailleurs mais moins de 20 travailleurs doivent garantir un droit individuel à la formation d’au minimum 1 jour par an par équivalent temps plein.
Dans ce cas aussi, le solde des jours de formation non épuisés pourra être transféré, 1 jour de formation aura dû être accordé en moyenne à la fin de la période de 5 ans et le travailleur aura le droit de prendre le solde de ses jours avant la fin de son contrat de travail en cas de licenciement.
Sursalaire ?
Les formations peuvent être suivies tant pendant qu’en dehors des heures de travail. Dans ce dernier cas, ces heures donneront droit au paiement du salaire normal, sans toutefois donner lieu au paiement d'un éventuel sursalaire.
Source(s) :
- Divers médias.
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